Les ateliers « musicothérapeutiques » fonctionnent bien à la résidence « les grouettes » de St Michel sur Orge. Un lundi sur deux, j’ai rendez-vous avec un petit groupe de résidents dans un coin du réfectoire. Nous sommes tranquilles, ensemble, et les résultats positifs ne se sont pas fait attendre.

Lundi 11 mars, j’arrive, guitare à la main, à 14h15 dans l’établissement pour veiller à la bonne installation des résidents.

Le groupe du jour était au complet : Neva, Messie, Jeanine, Huguette, Germaine, Denise, Etiennette, Annie, Josette, Myriam, Hélène et Marie-Louise étaient présentes, soit douze résidentes, ce qui est pas mal.

Une jeune stagiaire, Amandine,  dont c’était le  premier jour à l’ehpad , est restée pour m’épauler au besoin. Je l’ai installée près d’Etiennette qui a besoin d’être très motivée. Merci Amandine !

Comme la semaine passée, j’ai commencé avec une de mes chansons : « Un jardin sur une île » . Comme c’est nouveau pour elles (je dis elles car le groupe n’est constitué que de femmes) elles écoutent avec la plus grande attention et je vois sur leurs visages des sourires sur les mêmes passages de la chanson, ce qui prouve que certains mots touchent en même temps des personnes venant d’horizons divers et ayant une culture différente.

Elles apprécient beaucoup cette chanson, elles me l’ont dit. Alors la prochaine fois je leur amènerai le texte pour qu’elles puissent suivre en même temps que je chante, et dans la mesure de leurs envies, en fredonner quelques passages avec moi.

Nous avons fait un quiz un peu particulier aujourd’hui. Je commençais quelques gros succès Français des années 80 , 70 et 60 mais je faisais « la la la »  sur la mélodie et leur demandais de me citer l’interprète ou le titre de la chanson. C’est un exercice très difficile pour elles. Personne n’a trouvé un seul titre, et Neva a trouvé deux chanteurs. Par contre, tout le monde a fredonné avec moi dès les premières mesures, et Marie Louise et Annie ont même chanté avec les paroles (même celles des couplets).

Cela prouve quoi?

• Que la mélodie est plus forte que le texte, certainement.
• Que les mélodies restent gravées très profondément dans notre cerveau, en tout cas plus profondément que les mots.
• Qu’il est difficile de se rappeler le titre d’une chanson et d’un interprète. Cela est valable pour tout le monde, pas spécialement pour les résidents d’un EHPAD qui souffrent de problèmes de mémoire.
• Que les belles mélodies sont éternelles.
• Que les résidentes de mon groupe réussissent à se rappeler quand elles sont dans le plaisir, le ludique, et qu’elles se sentent bien au sein d’une groupe, sans stress et au calme.

Je viens de citer Annie un peu plus haut, j’aimerai vous en dire un peu plus la concernant :

Annie fait partie d’une famille de musiciens-chanteurs-amateurs. J’ai rencontré à maintes reprises ses enfants et petits enfants et quand elle chante en famille c’est tout à fait remarquable. Je me souviens d’un jour d’anniversaires où Annie avait chanté à trois voix (en harmonie) avec sa fille et sa petite fille.

Annie, depuis quelques temps, se sent diminuée. Je l’entends me dire : « mais non je ne vais pas venir chanter, je ne suis plus bonne à rien…». Je la pousse toujours à nous rejoindre même si elle semble fatiguée. Je lui demande de s’installer au plus près de moi au premier rang, pour la motiver et ainsi pouvoir bien l’écouter.

Cela fait trois semaines maintenant que, si on l’écoutait, elle ne viendrait pas. Et cela fait trois semaines qu’Annie est de loin la meilleure du groupe, et qu’elle me dit, une fois l’atelier terminé : «  oh qu’est ce que ça m’a fait du bien..; ah bon? j’ai bien chanté? oh tu m’étonnes là »…

J’ai dû insister pour qu’on accepte d’amener Annie à cet atelier du 11 mars, et je n’aurais pas commencé sans sa présence. Prétexte entendu : «  Non, Madame x (Annie), elle baisse vraiment en ce moment, la mémoire et le moral lui font défaut » … grrrrr!

Alors justement ces ateliers à but thérapeutiques sont fait pour des personnes comme Annie!! Entendons nous bien là dessus. Je ne suis pas là que pour « divertir les résidents » comme aux anniversaires.Même si divertir est déjà un grand pas vers la bien traitance de nos aînés, j’ai l’impression que mon travail en atelier est bénéfique, tout en restant agréable et ludique.

Je n’attends pas de reconnaissance de la part du personnel, celle des résidents me suffit, mais juste un minimum de respect pour mon travail serait souhaitable parfois.

Ceci dit, parlons un peu de cet atelier de lundi dernier.

La disposition du groupe :

J’ai l’air peut être de jouer les «emmerdeurs » quand je précise aux soignantes et aux animatrices la manière dont je souhaite que les résidentes soient installées mais ça a son importance. Pour schématiser et vous donner une idée, je dispose quelques chaises en arc de cercle devant moi, et je fais installer les fauteuils roulants en deuxième rangée, également en arc de cercle et si possible en quinconce.

Pour simplifier: Je veux voir tous les visages et si possible que tous me regardent. Le premier rang est réservé à celles qui souffrent de problème de mémoire et/ou qui sont perturbées car fraichement entrées dans cet Ehpad. Le deuxième rang est réservé à celles qui souffrent aussi dans leurs corps et qui participent peu et je prévois toujours quelques chaises à côté des fauteuils pour d’éventuelles stagiaires ou bénévoles venant m’épauler et soutenir les plus fragiles.

Ainsi personne n’est à l’écart, à l’image de Denise. Cette femme ne s’exprime pas (ou si peu). Elle est sanglée dans un fauteuil et passe ses journées à émettre des râles… ce qui agace un peu les plus valides. Mais lorsque la musique démarre, Denise est calme, attentive, et même parfois souriante comme c’était le cas ce lundi (merci Denise pour le joli sourire offert).

Les bénévoles habituelles n’étaient pas des nôtres ce lundi, bien qu’étant dans l’établissement. Elles avaient été réquisitionnées pour des activités manuelles dans la salle d’animation. Cricri et Françoise sont pourtant bien utiles lors de mes ateliers. Elles connaissent bien les résidents et l’amour qu’elles leur apportent n’a pas d’égal.

Les chansons du jour :

Côté répertoire, nous avons navigué entre La fleur aux dents, Le chemin de papa, Vive la rose, entre autres, en ce qui concerne  les chansons rythmiques qui nous permettent quelques exercices comme «taper dans les mains en rythme» tout en chantant.

Chez Laurette, Si maman si , Aux marches du palais, pour chanter ensemble et rester concentrés.

Trois petites notes de musique, Les vieux mariés, juste à écouter.

Je n’aurais pas le temps à fredonner la bouche fermée ( difficile pour le souffle mais très joli à entendre).

Pour nous défouler nous avions des titres comme La poupée qui fait non.  Le principe était d’hurler « non, non, non non non, non » ! Elles se sont régalées à faire ça et tout le monde a participé à ce genre d’exercice ludique!

Merci à toutes pour le bel effort fourni et les sourires échangés. Tout le monde est en progrès et c’est visible. Je suis allé les voir quand elles avaient rejoint la salle d’animation en attendant le goûter, et j’avoue qu’une fois de plus j’ai remarqué que leurs visages étaient plus détendus qu’en arrivant à l’atelier.

Prochain atelier le 8 avril. En attendant je serai à la résidence les Grouettes pour faire chanter tout le monde le 27 mars, date ou nous célèbrerons les anniversaires mensuels dans la joie et la bonne humeur, car cette fois-ci je serai là pour « divertir les résidents ».