J’ai lancé cette idée dans quelques EHPAD il y a quatre ou cinq ans. Certains ont suivi et franchement je ne regrette pas du tout cette expérience. L’idée est d’aller disperser quelques mélodies populaires et un peu de douceur au coeur des unités de vie protégées (UVP)ou en PASA (Pôle d’Activités et de Soins Adaptés) ou les accueils de jour.
Qu’est ce qu’une Unité de Vie Protégée ?
Anciennement appelée Cantou (Centres d’Activités Naturelles Tirées d’Occupations Utiles), l’unité de vie protégée accueille des personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer ou assimilée et/ou ayant des troubles du comportement et des signes de démence.
C’est un endroit sécurisé où la population est restreinte en nombre, en général 10 à 20 résidents.
C’est parce qu’ils sont peu nombreux que mes ateliers ont pu se faire. A l’origine je voulais restreindre l’assistance à 10 personnes, et puis finalement j’ai fini par accepter tout le monde, parfois même des résidents venant d’autres unités, ce qui fait que bien souvent nous nous sommes retrouvés à 20 personnes, ce qui est beaucoup trop.
Pour mes ateliers , l’idéal est un groupe constitué de 10 à 13 personnes. (maxi 15)
Je limite les places parce que je tiens absolument à ce que chaque individu puisse rester connecté pendant une heure avec moi.
Je demande à ce qu’on installe les résidents en arc de cercle face à moi, et en quinconce pour que tout le monde puisse me voir facilement.
Je reste la plupart du temps assis sur une chaise face à eux.
Je n’amène pas de percussions (maracas et autres tambourins) contrairement à ce que font en général les «musicothérapeutes . J’ai ma guitare sur les genoux et je préfère de loin que les résidents, au besoin, frappent dans leurs mains ou sur les accoudoirs de leurs fauteuils, ou par terre avec leurs cannes, s’ils veulent faire du « bruit » en m’accompagnant.
L’idée est de raviver les mémoires, motiver la concentration, prendre du plaisir, à travers les chansons populaires.
De notre naissance à notre mort nous entendons au moins, je dis bien « au moins », une chanson par jour. Ça laisse des traces.
La chanson populaire est de loin la musique la plus fédératrice, celle qui touche nos émotions, de par ses mots et/ou sa mélodie. Nous avons tous en tête des chansons qui nous rappellent les bons, parfois les moins bons, souvenirs de nos vies. Nous avons tous une, voire plusieurs chansons fétiches.
Lors d’un atelier en UVP, je ne prévois jamais de programme. C’est la discussion avec les résidents qui oriente ce que je joue. Je fais tout pour qu’ils m’aiguillent, qu’ils participent activement à la programmation.
Par exemple, je commence par une chanson de Michel Delpech, ensuite je leur demande de me citer quelques « Michel » célèbres, et en fonction de leurs réponses, j’enchaine avec du Polnareff ou du Sardou.
Une toute petite partie d’entre eux sont capables de jouer à ce jeu et rares sont ceux qui peuvent me citer un titre de chanson, mais quasiment tous reconnaissent un air populaire et le chantent avec moi avec bonheur.
Les femmes sont plus nombreuses que les hommes en Ehpad, donc également en UVP.
Les rares hommes rencontrés participent aux ateliers, un peu moins que les femmes, mais restent plus concentrés qu’elles.
J’ai vu bien des hommes pleurer en écoutant certaines chansons.
Les hommes et leurs larmes de bonheur. Les femmes sont moins timides, moins réservées. Elles se laissent facilement emporter par une joie de vivre immense.
La chanson populaire a cette redoutable force, elle ravive les souvenirs d’une vie et touche très rapidement les émotions.
Certains résidents n’ont hélas plus accès à la parole car leur maladie est très avancée mais ça ne les empêche pas de participer à leur manière. J’ai vu des résidents me fixer dans les yeux pendant une heure, sans en perdre une miette, parfois même réagir en souriant ou en gesticulant.
C’est pour ça qu’il est préférable lors de leur installation que tout le monde puisse me voir en face.
Pour soutenir et motiver les plus fragiles d’entre eux, je demande toujours la présence de soignants (ou bénévoles, services civiques, quand les soignants ne sont pas dispos). Je leur demande de fredonner les airs à l’oreille des plus fragiles.
La présence de l’animatrice de la maison est également souhaitée mais rares sont celles qui assistent à ces ateliers car elles profitent de ma présence en UVP pour occuper les autres résidents de l’Ehpad.
Quand elle est disponible, la (ou le) psychologue de l’établissement peut assister aux séances. C’est arrivé une fois.Une psychologue avait tenu à assister à mes ateliers pour découvrir les résidents dans cette situation, les connaître autrement .
De même qu’il m’est arrivé de voir des psychologues lors des animations festives où les familles sont présentes. Ce sont de bonnes indications pour les psy… voir les résidents dans un autre contexte, entourés de leurs proches.
Les directrices (directeurs) des Ehpad sont toujours les bienvenus également (n’en serait-ce que 5 minutes pour se rendre compte) mais, à part la directrice de l’Accueil St François à Fontenay sous bois, je n’ai jamais eu le plaisir de croiser quelque directrice que ce soit lors des « ateliers mémoire », c’est dommage.
Les aidants sont également bienvenus, s’ils restent en retrait de leurs proches et s’ils sont discrets.
Lors de ces moments privilégiés entre nous, il y a donc des chansons, des discussions, des quiz (pas compliqués) mais aussi de bonnes parties de rigolade.
Le plus important est le lien qui se tisse. Le lien tissé avec moi mais aussi entre eux.
Plus ma présence est récurrente, plus le lien est fort, plus les ateliers sont efficaces.
Nos rendez-vous hebdomadaires, bi-mensuels ou mensuels, sont des repères pour eux.
J’arrive en avance. Le temps de l’installation est aussi un temps de discussion. Nous prenons des nouvelles les uns des autres. Nous chantons pendant une heure, et bien souvent je prends un petit goûter avec eux après, ce qui nous laisse encore un peu de temps pour papoter.
J’insiste beaucoup là dessus. Le lien!
Lorsque mes visites sont récurrentes et que l’on commence à bien se connaitre, je leur joue des chansons qui leur sont inconnues. Les miennes par exemple, je suis certain qu’ils ne les ont jamais entendues.
Et chaque semaine je commence par une chanson inédite. La bonne surprise est qu’une bonne partie d’entre eux finisse par la fredonner avec moi. Ils apprennent ainsi des airs nouveaux.
J’ai fait cette expérience avec une de mes compositions – un jardin sur une ile – qu’ils n’ont aucune chance d’avoir entendue quelque part puisqu’elle est totalement inédite. Je me souviens de certains endroits où au bout de quelques ateliers quelques résidents me réclamaient cette chanson, à leur manière : « Tu peux nous jouer ta chanson qui parle de jardin? »
J’aime aussi motiver leurs capacités à improviser. C’est assez rare dans les UVP, mais certains, désinhibés par leur pathologie, se débrouillent bien.
Capacité à « improviser » , c’est à dire dès la première écoute , capacité à reprendre le refrain en fin de chanson. La mélodie doit être facile pour cela.
Un bon exemple de chanson pour improviser qu’ils ont peu de chance d’avoir entendue : Les torrents d’amour de Line Renaud
Cette chanson que j’ai eu le plaisir de composer sur un texte de Michel Delpech, est sortie en 2009, et, bien qu’elle ait été disque d’or, elle est très peu passée en radio et rares sont les résidents en Ehpad qui la connaissent.
Je leur joue une fois. Ils écoutent attentivement, ils découvrent. Je leur rejoue en fin de séance et certains commencent à la fredonner avec moi. Je leur rejoue la semaine d’après et d’autres encore la fredonnent dès la moitié de la chanson. Et ainsi de suite … la chanson devient récurrente et au fur et à mesure de mes venues, ils finissent par la chanter avec moi.
NB: Les torrents d’amour de Line Renaud figure sur l’album Rue Washington (2009 Warner)
Certains établissements ont baptisé (sur leurs programmes internes) mes ateliers chansons : « séances de musicothérapie ». Je ne m’attribuerais pas cette appellation n’étant pas « psychologue » et encore moins diplômé en musicothérapie.
Si l’on traduit « musicothérapie » par « faire du bien avec la musique » alors j’accepte cette appellation.
Je crois que l’’essentiel est là : faire du bien de manière ludique !
Une guitare, des voix, des sourires, de la douceur, des rires, des moments complices, tous unis autour de quelques chansons.
J’ai visionné quelques séances de « musicothérapie » que l’on trouve sur le net. Je ne m’inscris pas du tout dans ce genre d’exercice.
Mon chemin est simple : Le lien, le plaisir, la chanson populaire, la concentration, la complicité.
Pour ceux qui sont les plus actifs mentalement et donc les moins atteints par leur pathologie, ces séances sont des ateliers chansons « mémoire », pour les autres ce sont des ateliers « bien-être ».
Je parle ici d’Unités Protégées mais ces ateliers peuvent très bien avoir lieu en Accueil de jour.
Pour qu’ils soient les plus efficaces possible, j’insiste sur leur récurrence.
Mensuels ou Bi-mensuels, selon les budgets… c’est l’idéal !
Les ateliers de manière ponctuelle dans l’année sont beaucoup moins efficaces et même « inutiles » Il nous faut à chaque fois faire à nouveau connaissance (comme dit la chanson) en profondeur. Et puis ce n’est pas ce que je cherche à travers mon travail. Je n’ai pas cette conception là.
Evidemment, j’étudie chaque proposition et j’établis un devis personnalisé pour les établissements qui le désirent.
Je suis facile à contacter et je réponds à toutes les demandes.
NB : Ci-dessous, quelques ouvrages intéressants sur le sujet et quelques liens utiles : cliquez sur les images
https://www.francealzheimer.org
https://www.urgence-alzheimer.fr
https://www.vaincrealzheimer.org
7 réflexions au sujet de « Les ateliers chansons « mémoire et bien-être » en unité protégée/PASA ou accueil de jour »