Quatrième volet de mes « histoires de chansons ». Merci à tous ceux qui ont suivi de très près mes articles racontant la belle histoire de l’album Comme Vous de Michel Delpech mais aussi l’histoire d’une belle amitié entre nous deux.
Merci également à l’intérêt que vous avez porté à la lecture des trois premières histoires de chansons, celles de Comme vous, Elle ne passera pas un hiver de plus ici et Dans chatou qui dort. Les nombreux témoignages et messages reçus m’ont été droit au coeur.
C’est au tour d’une des plus populaires de l’album et certainement une des préférées du public d’être mise à nue :
Paroles : Michel Delpech / Musique : Laurent Foulon
- de l’écriture à la composition :
Les paroles:
Pauvre petite infante défaite,
Oublie le, sors le de ton coeur,
Un jour, un jour peut être , il reviendra de ses erreurs…
Ces mots là, on peut les trouver dans la préface d’un livre de son épouse, Geneviève Delpech : Le livre paru en 2000 s’intitule « De cendres et de braises », préface signée Michel Delpech.
J’imagine que c’est ensuite devenu pour lui l’occasion d’écrire une chanson. Je me souviens simplement que ce texte qu’il a écrit seul n’était pas terminé lorsqu’il me l’a remis, timidement comme à son habitude, entre les mains.
la composition :
J’ai trouvé la mélodie assez rapidement. Les couplets et les refrains s’enchainaient facilement je l’avoue. Etonnamment j’ai un peu ramé pour l’ambiance différente du couplet : « tu ne peux pas rester sans cesse à agiter ton blanc mouchoir ». Et pourtant y a rien de compliqué là dedans.
Personnellement je trouve que la mélodie est « tubesque ». Si seulement la réalisation avait été à la hauteur… peut être que cette chanson aurait été un single?
la Belgique :
La tournée en Belgique lors de lété 2003 (celui de la canicule) a été le point d’orgue du peaufinage de nos chansons. Je raconte ça dans l’article ci-dessous:
La course du voyageur a été construite à Liège, à l’hôtel Bedford qui depuis a changé de nom. Michel a trouvé l’idée de réponse de choeurs « la course du voyageur » et nous avons structuré et amélioré le texte et la mélodie, à quatre mains.
Nous étions très enthousiastes, nous faisions du bruit la nuit à l’hôtel et les gens ne disaient rien, mieux même, le matin lorsqu’ils croisaient Michel ils lui demandaient gentiment un autographe, ce qu’il n’a jamais refusé à qui que ce soit, sourire compris.
Réalisation et enregistrements :
On ne peut pas dire que c’est le morceau dont je suis le plus fier au niveau réalisation. Même si j’aime beaucoup cette chanson, la manière dont je l’ai réalisée ne correspond en rien à ce que j’entendais dans ma tête… et je porte entièrement cette responsabilité.
Pour couronner le tout, j’entends mon jeu de guitare (pas terrible) partout et ma voix également, donc ça ne me plait pas.
Il était prévu qu’ Eric Sauviat et Bertrand Belin s’occupent des guitares, Alain Kohn de la basse et David Maurin de la batterie.
Nous avions fait une maquette avec ma voix dessus mais pas réellement une pré-production avec la voix du chanteur et des arrangements un peu plus élaborés.
Lorsque David et Alain se sont occupés de la rythmique, et que les guitaristes ont joué, je me suis rendu compte que la direction n’était pas la bonne.
J’avais une idée très précise dans ma caboche et j’étais bien incapable de l’expliquer, et encore moins de la jouer comme je l’entendais.
Notre ami Manu Lanvin qui nous rendait souvent des visites amicales, est venu un jour où je ramais sur cette chanson et j’étais assez désespéré, au point que je pensais sincèrement la retirer de l’album.
Manu me propose gentiment d’essayer de jouer la guitare folk qui fait la rythmique. Je dis ok, nous passons beaucoup de temps, Manu est courageux et ne rechigne pas devant l’effort… Résultat des courses, ça ne marche pas. C’est très bien mais ce n’est pas ce que j’imaginais.
Christophe Marais, notre illustre ingénieur du son, me souffle : « peut être devrais tu jouer les guitares? »
Euhhh… ah bon??? ok j’essaye.
J’ai passé la journée et me suis régalé à faire mumuse avec une guitare électrique, en l’occurence la télécaster de notre ami Bertrand Belin.
Au bout du compte, on a gardé mes guitares folk et électriques. Mais j’ai un peu de mal à les écouter car mon pauvre talent de gratouilleux ne mérite pas de se retrouver propulsé en avant sur toute une chanson de cet album là.
Michel adhère (bon gré mal gré?) à mes guitares. Je me dis qu’après tout si ça lui convient pour chanter, ça me va.
Avec l’aide de Christophe Marais, j’ajoute quelques synthés issus de la maquette parce que Michel les aime bien et qu’il nous dit que ça va lui manquer si on ne les met pas.
Au final, je n’aime pas du tout cet arrangement, mais alors pas du tout. Dans ma tête ça sonne comme une maquette, et pour cause.
Peut être aurais je dû appeler mon copain Nikow à la rescousse ? Il aurait peut être trouver la bonne rythmique de guitare folk et/ou quelque gimmick de guitare électrique ? Lui qui avait tant marqué toutes les maquettes de son empreinte… mais on m’avait recommandé de ne pas trop faire appel au copinage.
Nikow (Nicolas Perrot) a toujours su traduire ce qu’il y avait dans ma tête. On a fait tellement de maquettes ensemble, et même si à l’époque il n’avait pas avalé un métronome (mais on aurait arranger ça), il avait le sens du petit gimmick de guitare que l’on retient facilement ..c’est un don.
En tout cas il aurait fait mieux que moi sans aucun doute. Je regrette de ne pas avoir eu le réflexe de l’appeler.
La voix :
Je n’ai pas de souvenir précis des séances d’enregistrement de la voix du chanteur. Peut être que c’est à cause de la réalisation que je n’aimais pas.
Ce dont je me souviens c’est que ça n’a pas trainé. Cette chanson va bien à l’ami Delpech. Les mots coulent bien dans sa bouche, et le timbre est parfait.
J’imagine donc qu’il a dû faire deux ou trois prises de chant, pas plus.
Par contre nous avons passé beaucoup de temps sur les choeurs, et énormément de temps à essayer d’améliorer l’entièreté de la chanson, une sorte de pré-mix. Notre ingénieur du son y est pour beaucoup dans l’amélioration de ce qui était devenu pour moi un vrai cauchemar. Disons qu’il a sauvé les meubles.
Les pires et meilleurs moments :
Les pires moments:
La réalisation que je trouve ratée, est en elle même le pire moment de l’histoire. Je trouve cette chanson décalée par rapport au reste de l’album. Malgré tout, je le répète, j’aime beaucoup le texte, la mélodie et la voix.
Autre moment désagréable concernant La course du voyageur. Le rajout de batterie au dernier moment, par mes soins, au studio Ferber, et la réflexion à juste titre de notre ami, le regretté David Maurin. Lui qui était si puriste du son de sa batterie, je m’en suis voulu de l’avoir dénaturé et je m’en veux encore. Je raconte ça dans un chapitre « comme vous » (voir ci-dessous).
Améliorer La course du voyageur était devenu mon obsession, et à force de bricoler ce titre là, nous avions perdu sa substance, son âme. Heureusement que nous avions un interprète magique qui pouvait embarquer l’histoire tout de même.
Les meilleurs moments :
Un de nos nombreux fous rires avec Michel : Je chante la réponse « la course du voyageur » dans les choeurs. Michel est derrière la console et soudain il entend la voix de Daniel Guichard !
Pour tout vous dire, j’imite plutôt bien Guichard, et un jour pour détendre l’atmosphère j’ai pris ma guitare et j’ai joué et chanté tout l’album à la manière de ce chanteur « gouailleur attendrissant » devant un Delpech qui pleurait de rire.
Du coup, lorsque je me suis mis à chanter la course du voyageur, pour plaisanter deux minutes j’ai pris de voix de l’interprète de « mon vieux » . Fou rire général ! Mais lorsque je me suis remis à chanter normalement Michel croyait que je continuais à imiter alors que je chantais avec ma voix normale .. Bref, nous avons mis plusieurs heures à nous en remettre, et même plus tard sur scène, lorsque j’envoyais ma phrase de choeur, l’ami Delpech avait immédiatement l’oeil qui frisait en me regardant.
Les meilleurs moments resteront sans doute ceux où nous la jouions sur scène… Cette chanson était faite pour être offerte en live au public, et aucun arrangement studio (je dis ça pour me consoler) n’aurait pu égaler sa version « vivante ».
Merci à tous de faire connaître cette chanson là , comme toutes celles de l’album Comme Vous .Les liens vers amazon pour vous les procurer en mp3 sont ci-dessous en cliquant sur l’image (et en bleu dans l’article).
Ecouter l’album Comme Vous ou ses autres chansons fait revivre le chanteur populaire qu’était Michel Delpech. Chanteur populaire certes, mais aussi un bien bel Auteur souvent ignoré du grand public.
Il savait mieux que quiconque nous raconter nos existences avec poésie.
Merci de votre fidélité.
« Longtemps, longtemps, longtemps
Après que les poètes ont disparu
Leurs chansons courent encore dans les rues …. » Charles Trénet.
Mille mercis Laurent pour ce témoignage de votre indéfectible amitié qui nous permet avec grand bonheur de réentendre la voix de Michel Delpech !
Marilou
Ma petite amie et moi avons rompu après 10 années de relations compliquées. Le hasard a voulu que j’entende cette chanson dans mes écouteurs alors que je rentrais chez moi. Les paroles m’ont touché droit au coeur. Ce n’est pas une chanson parfaite, j’en conviens, mais je l’écoute en boucle depuis. Merci beaucoup